1,5% en France vs 300 000 prescriptions en Allemagne. Pourquoi l’écart est si brutal
Entre 60 et 80% des projets numériques hospitaliers échouent. Mais la télésurveillance ? C’est différent. Ce n’est pas l’échec. C’est l’inégalité.
En France : moins de 1,5% des patients éligibles bénéficient de télésurveillance fin 2024. Deux ans après son entrée dans le droit commun.
En Allemagne : 300 000 prescriptions. 56 applications remboursées. 80 millions d’euros de budget en 2024. Multiplié par sept depuis 2021.
Cette différence n’est pas un détail. C’est un signal : l’organisation, pas la technologie, détermine le succès.

France : rigueur qui paralyse
D’abord, voyons le cadre français.
La télésurveillance couvre six pathologies uniquement : insuffisance cardiaque, rénale, respiratoire, diabète, prothèses cardiaques, oncologie. Cette liste vient de l’expérimentation ETAPES (2018-2023).
L’avantage : base scientifique solide. Le problème : potentiel de marché étroit. Très étroit.
Ensuite, parlons rémunération. Double système :
- Exploitants : 43,45€ à 91,67€ mensuels
- Opérateurs médicaux : 11€ à 70€ par mois
Théoriquement ? Viable. Réellement ? Les critères d’accès sont labyrinthiques.
Pour l’insuffisance cardiaque « niveau 2 majoré » (70€), vous avez besoin de combos précises : âge, comorbidités, situations cliniques très spécifiques. Cette granularité administrative assure la rigueur. Mais elle bloque aussi les professionnels.
Air Liquide a quitté le marché français. C’est révélateur.
Le SNITEM l’a déclaré : « critères d’évaluation dépassés, conçus pour la médecine d’hier. » Les méthodologies traditionnelles ne matchent pas les dispositifs numériques. Point.
Allemagne : pragmatisme qui marche
À l’inverse, l’Allemagne a choisi « fast-track ».
Le programme DiGA (Digital Health Applications) : le BfArM évalue en 3 mois maximum. Inscription provisoire ? 12 mois pendant que vous collectez les vraies données.
Résultat : 73 millions d’assurés accèdent rapid aux innovations. Cadre sécurisé maintenu.
Le spectre thérapeutique s’élargit considérablement : 53% des DiGA traitent les maladies psychiques. 11% couvrent les troubles nerveux. 11% les pathologies musculo-squelettiques. Comparé à la France ? C’est trois fois plus large.
Les chiffres progressent vite : 300 000 prescriptions dépassées en 2024. Les universités allemandes offrent même des cours dédiés aux DiGA.
Mais attention : seulement 30% des Allemands connaissent les DiGA. Et 20% des prescriptions ne s’activent jamais. Donc l’Allemagne a des défis aussi. Simplement, ces défis n’entravent pas la croissance.
Le vrai blocage : les médecins, pas les patients
En France comme en Allemagne, le même problème surgit : les professionnels de santé galèrent.
En France, c’est pire. Gérer les données, traiter les alertes, c’est du travail supplémentaire. Et dans un contexte de déserts médicaux croissants, qui l’absorbe ? Les médecins demandent : « Qui me libère du temps ? »
L’Allemagne répond partiellement par la formation. Spécialisée. À grande échelle. C’est le différenciel clé.
L’évaluation : le goulet français
Le programme PECAN français l’illustre.
Depuis 2023 : 10 dossiers déposés. 3 avis favorables. Tous sur la télésurveillance.
Cette sélectivité garantit la qualité. Mais elle étouffe aussi l’innovation. Donc le Collectif Télésurveillance Médicale propose une alternative : méthodologies hybrides.
Mêler données de vie réelle, retours d’usage, indicateurs de performance populationnelle. Reconnaître que les dispositifs numériques ont un impact organisationnel au-delà des critères biomédicaux classiques.
Pourquoi c’est important ? Parce que la télésurveillance, ce n’est pas juste une app. C’est une réorganisation du flux de soin entier.
Comment débloquer le marché français
D’abord, assouplir sans céder sur la rigueur.
L’Allemagne le montre : une prise en charge provisoire accélère l’accès patient. Et vous collectez les vraies données en parallèle. PECAN a amorcé ça. Il faudrait élargir.
Simplifier les critères d’éligibilité aux forfaits majorés, aussi. Moins de granularité administrative. Plus d’accès réel.
Ensuite, équiper les professionnels.
Les « délégués numériques en santé » existent déjà. Rediriger 30% des efforts sur la télésurveillance changerait tout. Formations continues. Modules en faculté de médecine. Coaching sur le terrain.
Signal fort : accord franco-allemand juin 2025
La France et l’Allemagne ont signé un accord de coopération sur l’évaluation des dispositifs médicaux numériques. Objectif : harmonisation. Reconnaissance mutuelle. Accès au marché accéléré.
Échéance clé : révision des lignes génériques de télésurveillance en **2026 par la CNEDiMTS.
C’est le moment ou jamais. Intégrer les retours d’expérience. Adapter le cadre. Passer à l’action.
France a les atouts, pas la stratégie
Excellence médicale reconnue. Innovation technologique de pointe. Système de protection sociale performant. La France a tout.
Ce qui manque : concilier rigueur scientifique et pragmatisme opérationnel. S’inspirer de l’Allemagne. Préserver les spécificités françaises.
Plusieurs millions de patients chroniques attendent. L’enjeu dépasse la question technique. C’est un enjeu d’organisation des soins.
Pour les MedTech, c’est cristallin : les entreprises qui naviguent bien dans ce contexte évolutif gagnent. Anticiper les assouplissements réglementaires. Développer des solutions adaptées aux professionnels. Capitaliser sur le potentiel.
Pour approfondir
- ANSM – Télésurveillance médicale
- DiGA Allemagne – Programme BfArM
- CNEDiMTS – Évaluation dispositifs médicaux
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À propos de l’auteur
Nicolas Schneider est conseiller stratégique en transformation numérique santé et fondateur de JuliaShift. Avec 17 ans d’expérience au Service de Santé des Armées et 8 ans en consulting transformation digitale, il accompagne les startups MedTech et établissements de santé dans leur stratégie de financement, structuration de partenariats pharma, et préparation de levées de fonds.
Spécialités : financement innovation santé, structuration levées de fonds MedTech, partenariats industriels pharma, conformité IA réglementaire.